Les patients atteints de mucoviscidose recourent aux Huiles Essentielles (HE) dans une proportion d’un quart à un tiers dans une étude en ligne. Ils recherchent leurs propriétés anti-infectieuses et fluidifiantes essentiellement pour limiter les surinfections bactériennes et le recours aux antibiotiques. Ils procèdent par automédication, souvent influencés par les pairs, ou suivent les conseils le plus souvent de pharmaciens. La plupart d’entre eux décrivent des effets positifs, mais peu communiquent sur ce sujet avec leur médecin référent ou traitant.

Quelques rares usages sont problématiques du fait de toxicités alors que les effets positifs ressentis sont nombreux mais négligés par la médecine et non explorés. S’y ajoute un débat pharmacologique sur les interactions des HE avec les antibiotiques. L’ensemble de ces résultats plaide pour une meilleure prise en compte de ces recours pouvant déboucher sur des conseils pratiques et une meilleure communication médecin-patient. Lors des 3^èmes journées francophones de la mucoviscidose à Lyon en 2018, un atelier aromathérapie a révélé que l’écrasante majorité des patients présents faisaient un usage régulier des huiles essentielles (HE). La lettre des patients a plusieurs fois témoigné, ou encouragé à l’usage des HE parfois même qualifiées « d’antibiotiques naturels », alors même que les blogs du site de « Vaincre la mucoviscidose1 » (VLM) mettant en relation médecin et patients les déconseillaient « par manque de données scientifiques ». Il est donc apparu nécessaire de quantifier et de qualifier ce phénomène. Les HE bénéficient dans le grand public d’une image de puissance, en particulier anti-infectieuse, basée sur de nombreuses études in vitro, mais plus incertaine in vivo. Ces produits ont une composition fluctuante et des statuts divers, le plus souvent de compléments alimentaires. Leur usage, essentiellement en automédication, est en constante expansion. Elles semblent particulièrement utilisées par les patients atteints de mucoviscidose du fait d’allégations qui résonnent avec leurs problématiques infectieuses, la mauvaise qualité de leurs mucus, et leurs troubles digestifs, dans un contexte de généralisation du recours à ces produits dans le public. Malgré le manque de données cliniques, les patients y recourent et dialoguent peu avec leurs médecins référents, ce phénomène restant ainsi dans l’ombre. Nous avons donc proposé à VLM une étude afin d’objectiver l’usage des HE par les patients atteints de mucoviscidose sur un plan quantitatif (proportion d’usagers, HE les plus fréquemment utilisées, dosages pratiqués) et qualitatif (itinéraires thérapeutiques et leurs logiques, typologie des huiles utilisées et des formules, des praticiens impliqués, budget consacré, effets ressentis, dialogue avec les médecins). Le but est d’identifier de comprendre la logique du recours aux HE, d’identifier des pratiques potentiellement utiles en soin de support ou à l’inverse des pratiques à risque potentiellement dangereuses, et de favoriser le dialogue médecin-patients in fine.